Le dernier jeu d'un condamné
materiel nécessaire: un grand manteau de préférence noir, une chaise.
Le condamné est assis par terre, drapé de son grand manteau. La chaise se trouve derrière lui. Il a la tête baissé. Pendant toute la scène, il devra alterner entre le calme et le ressentiment. Après un temps, il lève lentement la tête jusqu'à fixer le public.
Le condamné: Condamné à mort! (calme) Voilà cinq semaines que j'habite avec cette pensée. (un temps. Pouffe de rire. Il ne doit jamais avoir l'air effrayé) condamné à mort...Puni de vivre. Privé de vivre, privé de lendemain. Je te condamne à mort. Tu as pris une vie et pour te punir, j'ai décidé de te prendre la tienne. Prenant prenant. Tu n'as plus droit de vivre. Condamné à mourir mais j'aurais aimé vivre, moi. (se parle à lui même) Alors dans ce cas, pense à la vie. (ironique) Oui, facile à dire, pense à la vie. Pense à la vie qu'il te reste encore, pense à aujourd'hui! Mais aujourd'hui je ne penserai qu'à la mort car demain, demain...! Ma vie, pffuit! (même jeu qu'auparavant, d'un air d'avoir enfin compris) C'est ton dernier jour aujourd'hui. (un temps.) Et qu'as-tu fais, qu'ai-je fais pour mourir demain? (grimace) Bof... j'ai tué une vieille. (reprend avec sérieux comme si il racontait une histoire au public) On pourrait croire qu'après cela, tout s'est très vite conclu. La sentence que l'on me réservait était simple et clair: (monte à genoux sur la chaise et imite le juge) Rendu coupable de meurtre au premier degré sans circonstance atténuante! Peine capitale! (coup de marteau imaginaire. Un temps, puis enveloppe sa tête dans son manteau et parle d'une voix exagérément terrifiante.) Condamné à mooooooort! (redevient sérieux) En réalité, l'affaire à duré trois jours. (exaspéré) Trois jours de procés! Trois jours que mon nom et mon crime ralliaient chaque matin une nuée de spectateurs qui venaient s'abattre sur les bancs de la salle d'audience comme des corbeaux autour d'un cadavre; ces mêmes spectateurs qui se presseront voir mon trépas demain matin. (se recouvre encore la tête de son manteau et imite avec une peur exagérée les spectateurs en montrant du doigt) Regardez tous! C'est lui ! C'est lui! Dites à vos enfants de détourner le regard! J'ai entendu dire qu'il battait sa femme et violentait sa fiiiille! Et on raconte même qu'il passait ses journées dans sa maison à torturer des animauuuuux! (reprend son sérieux et fais une grimace incrédule) Nan. (un temps) j'ai tué une vieille, c'est tout. (soupire) trois jours... (s'allonge par terre) Tu penses souvent à la mort? Surtout en ce moment. Pourquoi? Parce que demain je vais mourir. (un temps) Pourquoi tu ne dors pas? (se lève) parce que dormir c'est mourir un peu. (sérieux) Je me demande parfois à quoi pensaient les juges, les avocats, les témoins et les procureurs du roi. Condamné à mort. Ce qui n'allait pas chez moi, c'était mon geste. J'ai tué une vieille. Tuer c'est mal, (ironique) répétez bien cela à vos enfants avant qu'ils ne finissent tous comme le méchant condamné qu'on va exécuter demain. (sérieux) Un tueur est toujours tué. Ainsi est la justice. (un temps. Se recouche) Dans ce cas, je pense pouvoir dormir tranquille, car cela signifie que les prochains à poser leur tête sur le billot après la mienne seront les juges, les rois et tous les tribunaux. Mais comme il seront cette fois-ci sur le banc des accusés, reste à savoir qui sera là pour les condamner. (ferme les yeux et tourne le dos au public).
Noir.
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