Monde des Rêves 2.0 de Salomon Koubatsou

-Elle est au quatrième étage et elle est blessée. Elle a besoin d'aide.

  La gamine a à peine fini de parler que mes jambes se sont déjà ruées vers la direction indiquée, mues par un instinct, un réflexe irrépréssible qui pousse chaque fibre de mon corps à être auprès d'elle.

   L'Assassin qui cours à ma hauteur trouve entre deux foulées le temps de me lancer un furtif regard empreint de perplexitée: Lune n'est plus mon amie, je ne lui dois aucune asssistance ni aucun soutien. D'autant que son souvenir amène encore énormément de rancoeur avec lui dans mon esprit. Sont-ce les circonstances qui me font soudain oublier cette inimité? Non, je n'ai pourtant pas l'impression d'avoir mis de côté notre vécu. En fait, je n'y prête même plus attention, ma tête est entièrement focalisée sur sa mission de parvenir jusqu'à elle le plus vite possible.

   Et c'est dans cette course irréelle qu'inconsciement je crois comprendre ce que signifie réellement l'amitié. Même si nos chemins respectifs sont séparés à jamais, la force des sentiments que nous avons jadis nourris l'un pour l'autre a laissé un lien plus profond et plus fort que la plus farouche des bagues de fiançailles. Les instants où nos corps parlaient seuls, lassés de nos mots d'humains, s'abandonnant à l'expression brut de notre attachement l'un à l'autre... Les corps ont une mémoire et les nôtres n'oublieront jamais leur façon de communiquer. Notre relation appartient au passé mais notre lien, lui, ne peut pas se briser; il vivra tant que nous vivrons, même si nous devions un jour nous haïr de toutes nos forces.

   Je n'ai pas à me justifier davantage auprès de l'Assassin sur ma réaction. Notre lien, voilà l'unique raison pour laquelle je serais toujours là pour elle si elle a besoin de moi, même si je devais la détester. Voilà pourquoi nous serons toujours liés quelques parts, où que nous soyions, car l'amitié a laissé en nous des traces aussi persistantes que les cicatrices d'un couteau acéré. Nos deux jeunesses seront toujours entremêlées.

  Je ne cours pas vers elle par affection mais par devoir. Par instinct. J'obéis à mon âme qui garde en son sein un petit morceau d'elle. Deux sangs mêlés à jamais.